2001 — 2003 : l'émergence

Il existe une tradition d’étude des systèmes littoraux en Languedoc-Roussillon, notamment à Perpignan.

Sur la façade française méditerranée plus généralement, des centres comme le (ex-) LSEET à Toulon ou le CEREGE à Aix/Marseille travaillent également depuis longtemps sur des problématiques d’hydro-morphodynamisme littoral.

Sur Montpellier, la thématique « dynamique littorale » (à l’exception des travaux de Sabatier sur la propagation des tsunamis) a fait son apparition plus tardivement. C’est en 2001 que l’Université de Montpellier  permet une série de recrutements pour le laboratoire Géosciences-M sur cette thématique ; quasiment dans le même temps, des personnels des départements de Mathématiques et de Physique s’impliquent également sur ce thème de recherche.

À partir des années 2002 — 2003, il existe sur la façade Méditerranée un ensemble complet de micro-groupes de recherche abordant la dynamique littorale selon des points de vues très variés, et relativement cloisonnés.

2004 : premiers pas avec la région Languedoc-Roussillon

En 2004, la région Languedoc-Roussillon (désormais Occitanie) fait son premier appel d’offre Plateforme Technique régionale (actuels GEPETO). Un groupe de 15 chercheurs spécialisés sur le littoral se mobilise sur la façade Languedoc-Roussillon pour répondre à cet appel d’offre. Le dossier n’est pas véritablement retenu ni par les laboratoires ni par l’Université, mais il l’est très clairement par la région elle-même, qui considère que la dynamique littorale (tempête, érosion, submersion, montée du niveau marin, protection des plages) est une de ses priorités.

Nous créons donc GLADYS (initialement: Groupe LAnguedoc-roussillon d’étude de la DYnamique Sédimentaire littorale). Cette structure informelle regroupe alors de facto l’essentiel du dispositif de recherche régional sur l’hydrodynamisme sédimentaire littoral, couvrant un spectre large d’activités allant des approches naturalistes (océanographie, géosciences, archéologie, un peu de sciences humaines) à des considérations clairement plus physiques (génie côtier, mathématiques des écoulements/fluides).

Pour une durée de 2 ans (2004 — 2006), la structure conventionne l’Université de Perpignan, l’Université de Montpellier 2 et le CNRS, et regroupe des personnels du Centre Archéologique de Lattes, de l’Institut de Mathématiques et de Modélisation de Monptellier [I3M, désormais IMAG], de Géosciences-Montpellier, et même de la station de Banyuls dans un premier temps. Des personnels de laboratoires hors région (CEREGE, LEGI Grenoble, LSEET Toulon) se rapprochent rapidement du groupe GLADYS par le jeu des premières rencontres scientifiques régionales en Occitanie. Dans le même temps, plusieurs actions sont engagées (conventions, CIFRE, premiers financements, mise en place de petites structures fédératives comme des observatoires locaux) avec la plupart des acteurs publics travaillant sur la protection et l’aménagement littoral : EID-Méditerranée, DREAL LR (à l’époque: SMNLR puis DRE), CG34, CG66, conservatoire du littoral,… En particulier, à cette époque, la DREAL apparaît comme un interlocuteur particulièrement en phase avec les objectifs de travail des chercheurs, et réceptive à l’idée de placer la recherche au coeur des développements innovants pour la gestion et la protection du littoral de la façade.

2005 : premier succès en génie côtier et envol du réseau

A partir de 2005, plusieurs succès à des appels d’offre vont transformer la dimension de l’activité du groupe GLADYS 1. Tout d’abord, en 2005, l’Institut de Mathématiques et Géosciences Montpellier groupés dans le cadre de GLADYS 1, obtiennent le projet COPTER au premier appel d’offre ANR de l’état français. Le sujet concerne l’aménagement du littoral par des techniques d’optimisation de forme. A cheval sur les géosciences, l’expérimentation physique et les mathématiques appliquées, ce projet est accepté et s’avère être un réel succès de collaboration trans-disciplinaire, mais aussi entre scientifiques et gestionnaires, et scientifiques et entreprises. Depuis, et sans rupture, une bonne trentaine de projets de R&D ont été réalisés, portés par différents groupes au sein de GLADYS, et témoignent de l’engagement constant de GLADYS auprès des collectivités régionales dans la compréhension et la gestion de la dynamique littorale face au changement climatique et impacts anthropiques.

Dans le même temps, de gros projets d’instrumentions associant GLADYS 1 et la DREAL Languedoc-Roussillon permettent de renforcer un réseau de mesure hydrodynamique en mer. Associés autour de ce réseau de mesure, les scientifiques commencent à développer la notion d’atlas hydrodynamique du littoral (NAUSICAA, pilotage à Montpellier). Ils mènent également avec la DREAL de gros projets d’analyse de l’état des littoraux à différentes échelles de temps (pilotage par CEFREM, Perpignan). En outre, grâce à l’entremise du CG34, le groupe s’ouvre également sur d’autres partenaires européens, notamment en Italie, Espagne, Grèce et Portugal et certains chercheurs de laboratoires étrangers viennent désormais s’associer à GLADYS 1. GLADYS sort de la sphère régionale et devient actif sur le pourtour Méditerranéen en particulier.

2007 : consolidation des contours thématiques

En 2007, nous nous retrouvons avec un groupe trans-frontalier de environ 20 personnes, totalement informel (aucun cadre administratif), totalement trans-disciplinaire (mathématiques, géophysique, sédimentologie, géologie, océanographie, génie côtier, archéologie,…), travaillant sur tous les aspects de l’hydro-morphodynamisme littoral. L’interdisciplinarité est au coeur du projet car elle est nécessaire à la résolution de la plupart des grands questionnements d’actualité en sciences du littoral. L’activité ne déborde toutefois pas vers la biologie littorale et lagunaire car il existe une activité sur ces disciplines  largement développée en LR et PACA, déjà totalement structurée en plusieurs gros laboratoires. Nous décidons de nous centrer sur les approches mathématiques, physiques, observationnelles et principalement abiotiques de l’environnement littoral, pour des raisons de visibilité, lisibilité de notre action, et de respect des groupes/ activités déjà en place.

Nous savons à ce moment là que notre champ de compétences est et restera définitivement l’hydro-morphodynamisme littoral des géosciences aux mathématiques et la physique en passant par l’archéologie, l’océanographie physique, le génie côtier, la géomorphologie quantitative et certaines formes de SHS.

2008 — 2010 : rapprochement avec les OSU CNRS

Sur la période 2008 — 2010, l’OSU OREME (tout juste créé) décide de développer largement l’observation en zone littorale, en proposant la création d’un Système d’Observation « Littoral Trait de Côte » [SO LTC]. Le SO LTC reprend alors à son compte l’intégralité de l’activité de GLADYS 1 concernant la mesure temps réel en zone littorale, et conventionne (avec la DREAL LR) la valorisation des archives collectées par les services de l’état qui souhaitent se rapprocher d’un partenaire universitaire robuste pour en assurer la pérennité. GLADYS 1 ne disparaît pas mais se met en retrait quelques temps derrière le SO LTC puisque cette nouvelle structure est plébiscitée par les tutelles.

L’OSU OREME (en Occitanie) et l’OSU PYTHEAS (en PACA) deviennent des opérateurs terrain/ observation/ mesure/ stockage de référence pour l’ensemble de l’activité littorale à vocation académique (géosciences et physique) à l’échelle du Golfe du Lion. Un partenariat est signé dans le cadre de ces OSU entre 8 laboratoires du Grand Sud (reprenant les contours de 2010 du groupe GLADYS 1); nous déposons une demande de labellisation INSU pour tenter de trouver un sens administratif à cette action, jamais aboutie sous cette forme. Dès la fin 2010, nous pouvons considérer que le SO LTC représente un outil collaboratif entre scientifiques du Grand Sud, disposant d’habitudes de dialogue solide avec les gestionnaires du littoral et le tissue R&D régional. Il est encore à ce moment là un outil régional, solidement construit sur les notions de respect mutuel et de partage.

Mais très rapidement, en parallèle du SO LTC, nous imaginons le maintien d’un réseau GLADYS 2 permettant de fédérer à l’échelle du Grand Sud une recherche sur la dynamique littorale trans-laboratoire, trans-universitaire et donc mécaniquement trans-disciplinaire,  dépassant ce que peut offrir administrativement le SO LTC qui reste un outil technique porté par un OSU régional. A ce moment, cette notion de groupe intimement interdisciplinaire, totalement délocalisé, et exclusivement centré sur un sujet est une notion qui n’est pas évidente à faire accepter tant les barrières institutionnelles et disciplinaires sont fortes. D’ailleurs, la construction de GLADYS 2 ne trouve à cette époque aucune réponse administrative, et reste sans statut réel jusqu’à aujourd’hui encore.

2011 — 2015 : structuration nationale vs nécessité du réseau d'animation

Notre demande de labellisation par le CNRS INSU en 2010 débouche en fait sur un rapprochement de l’OSU OREME à Montpellier avec l’Institut Universitaire Européen de la Mer (IUEM) de Brest où nos collègues tentent de faire émerger une culture du réseau national spécialisé littoral. Sous le pilotage direct de Brest, les deux OSU IUEM et OREME organisent le montage d’un SOERE national sur le Trait de cote (SOERE LTC), une initiative nationale multi-tutelles qui témoigne notamment de l’engagement sans précédent de l’Institut National des Sciences de l’Univers du CNRS sur le thème du littoral. Ce SOERE Trait de Côte constitue la première ébauche d’un réseau national littoral post années 2000. Entre 2011 et 2015, le SOERE passe du statut de réseau confidentiel à un véritable outil national en agrégeant de nombreuses équipes locales sur la plupart des littoraux français. Cette transformation a été rendue possible par la capacité des OSU fondateurs (Brest et Montpellier) a renoncé à leur leadership exclusif initial, renoncement nécessaire pour garantir un partage équitable des ressources à l’échelle nationale. A ce jour, nous restons encore convaincu que les idées de partage portées par GLADYS ont contribué à une telle transformation, à coté de l’impulsion donnée par Brest.

En 2014, le SOERE Trait de côte cohabite puis disparaît au profit d’un Service National d’Observation DYNALIT (dynamique littorale) dont la mission reprend celle du SOERE avec une structuration nationale plus poussée.

A l’échelle de la façade Grand Sud, le SO LTC des OSU OREME et PYTHEAS passe sur la période 2011-2015 du statut d’outils régional à celui d’élément d’un dispositif plus large connecté à d’autres équipes nationales spécialisées. Le SO LTC dispose désormais de deux facettes: la régionale garantissant l’observation en façade Méditerranée auprès des Universités et de la société civile (gestionnaires, entreprises), et la nationale, garantissant la rationalisation et l’optimisation de l’observation littorale au niveau d’une communauté  scientifique non cloisonnée.

Sur cette même période, à coté du très officiel SO LTC, le groupe informel GLADYS 2, constitué en pratique des mêmes personnels, perdure toujours, plus actif que jamais, car il constitue la seule manière de faire discuter efficacement et quasi-quotidiennement des micro-équipes de recherche littorale dispersées à l’échelle de la façade maritime méditerranéenne. Du fait de son statut non officiel, GLADYS n’impose aucun leadership particulier et est donc désormais garant d’un sentiment d’équité entre les scientifiques, renforçant la solidarité et le partage de la ressource. GLADYS atténue aussi les effets de compétition et de recherche de leadership entre pôles universitaires et organismes de recherche. Enfin, GLADYS offre une certaine visibilité à des chercheurs qui sont inexistants dans leurs structures de rattachement, face à des axes de recherche historiques ayant du mal à laisser un peu de place à ces activités totalement interdisciplinaires et de rupture. Les membres de GLADYS s’investissent bien sur dans le réseau national DYNALIT.

2015 — 2017 : prise de conscience et plafond de verre

Sur cette période, le réseau national DYNALIT s’étoffe et s’organise encore un peu plus à partir de 2016 à l’occasion de la création d’une Infrastructure de Recherche Littorale et Côtière (IR ILICO), à l’image de ce qui se fait dans la plupart des grands domaines de la recherche française. Ces transformations administratives successives répondent à une logique de structuration croissante, nationale puis européenne, et mécaniquement de plus en plus hiérarchisée. L’idée derrière la démarche est évidemment d’augmenter la visibilité de la recherche française sur le thème large de la mer, et de capter des financements. Le système d’observation DYNALIT intègre cette infrastructure.

En façade méditerranéenne, le problème essentiel est que GLADYS 2 ne se voit pas comme une structure limitée à l’observation long terme et ne peut être réduit à un simple élément de DYNALIT, loin de là. Les membres pensent leur réseau en s’appuyant avant tout sur l’interdisciplinarité, le lien fort entre les sciences mathématiques/physiques et l’hydro-morphodynamisme littoral, le développement de projets académiques intimement liés aux applications R&D, l’acquisition de données littorales pas nécessairement long-terme et génériques, mais ciblées et à forte valeur scientifique ajoutée, le renforcement de la formation par la recherche des étudiants en doctorat. Tout ceci fait que l’adhésion des membres de GLADYS à cette évolution nationale est inégale. Le réseau GLADYS reconnait bien évidemment l’importance de l’action de l’IR ILICO pour la structuration de la recherche scientifique sur la mer et le littoral, y adhère et s’y investit. Le réseau GLADYS reconnait aussi l’importance du réseau DYNALIT pour l’acquisition de séries long terme continues. Mais le réseau GLADYS souhaite aussi continuer à fonctionner autour de son principe historique si efficace.

GLADYS 3 se re-organise autour des laboratoires de recherche eux-mêmes, et Géosciences Montpellier devient l’animateur administratif de ce réseau. De facto, Les OSU OREME et PYTHEAS restent les représentants régionaux du réseau DYNALIT, en charge des suivis long-termes officiellement reconnus à l’échelle nationale; les membres de GLADYS 3 s’investissent sur ces actions individuellement. Mais le réseau GLADYS 3 récupère le parc d’équipement originel dont il disposait, plus de 100 appareils de mesure, et se ré-approprie son rôle d’organisation de déploiements lourds, de développements d’outils d’analyse et de modélisation, d’animation scientifique et de formation par la recherche des étudiants. Ce sont les missions actuelles du réseau.

Dans un tel contexte, le réseau imagine aussi l’idée d’un Institut des plages GLADYS, un lieu où les valeurs du réseau GLADYS 3 pourraient trouver un ancrage pérenne, et où le parc d’instrument pourrait être gérer dignement. Le projet est lauréat en 2015 d’un CPER de la région Occitanie, pour la construction de ce lieu physique sur le littoral Occitanie, sur la commune du Grau du Roi, au centre de la façade méditerranéenne française. Le principe du projet évolue en un ou deux ans d’un lieu de manipulation / regroupement scientifique à un véritable mini-centre dédié aux sciences du littoral et le transfert R&D, sous la volonté conjointe de la région et des tutelles scientifiques régionales. Sur toute cette période, l’institut des plages reste un projet non concrétisé, faisant l’objet de discussions financières, logistiques et sur sa nature et son fonctionnement exacts.

2018 — 2021 : MUSE et l'Institut des plages GLADYS

Début 2017, Montpellier décroche un statut de I-site avec l’initiative MUSE (Montpellier University of Excellence), qui met en place dans les années 2018-2020 suivantes le concept de Key initiative, dont une spécifiquement appelée Sea & Coast, entièrement dédiée aux sciences de la mer et du littoral. Le projet d’institut des plages est inscrit dans l’initiative, et dans les faits, il devient un projet porté par l’Université de Montpellier. Sous l’impulsion de la présidence de l’Université de Montpellier, le projet se concrétise et rentre dans une phase opérationnelle (plans, pré-études, montage juridique).

Sur toute cette période, GLADYS 3 reste un outil collaboratif à l’échelle de toute la façade, maintient sa mission d’organisation de grands déploiements et d’animation scientifique, en attente de la mise en place de ce lieu physique.

L’implantation de GLADYS au sein de l’initiative MUSE se manifeste par l’obtention de financements spécifiques : 1) lauréat des appels d’offre « summer school » pour l’organisation des écoles d’été WAWA dédiées à l’analyse de données hydrodynamique littorale, très bien reçues au sein de la communauté littoraliste française, 2) lauréat de plusieurs projets Companies On campus, qui illustrent la capacité de GLADYS à se rapprocher de l’ingénierie et placer la recherche académique au cœur des enjeux sociétaux. GLADYS renforce aussi le couplage math-physique et sciences du littoral, en émargeant récemment sur plusieurs initiatives à forte coloration interdisciplinaire (PEPR, et PRIMES 80). Cette actualité des projets en cours montre que GLADYS ne renonce en rien à sa vocation d’outil de fédération de la recherche non hiérarchisé et strictement ciblé sur l’objet littoral.

A ce jour, le projet d’institut des plages GLADYS connait des problèmes de bouclage financier et administratif. La prochaine étape de la petite histoire de GLADYS est la finalisation de la mise en place de cet outil collaboratif sous le pilotage de l’Université de Montpellier. Rendez-vous ici même pour des nouvelles à partir de fin novembre 2021.